Cotonou a accueilli, les 3 et 4 avril 2025, la première édition du Salon du Sport Béninois, un événement de grande envergure dédié à la réflexion et aux échanges sur le développement du sport au Bénin. Organisé par l’agence Global Sport Management de Fawaz Adjibadé, ce salon a rassemblé une panoplie d’experts, d’acteurs et de parties prenantes de l’écosystème sportif, tant locaux qu’internationaux, avec une forte présence de spécialistes venus de Côte d’Ivoire. Le salon a permis de discuter de neuf thématiques clés pour l’avenir du sport béninois, dont le rôle essentiel du sponsoring dans l’économie du sport.
L’un des moments forts de l’événement a été la présentation de Mahama Coulibaly, expert ivoirien de l’économie du sport et CEO de l’agence de marketing sportif Esprit d’Équipe. Ce dernier a levé le voile sur les réalités du financement du sport en Afrique, en soulignant que le sponsoring, bien qu’essentiel, ne doit pas être perçu comme une philanthropie, mais comme un investissement stratégique. Selon lui, dans l’écosystème sportif européen, le sponsoring représente environ 22 % des revenus du sport professionnel, un montant considérable qui permet aux entreprises de booster leur visibilité en soutenant des activités sportives. En revanche, en Afrique, il est primordial de comprendre que les clubs dépendent encore largement des subventions publiques, représentant jusqu’à 80 à 90 % de leurs financements.
Mahama Coulibaly met en lumière la fragilité de ce modèle, qui reste trop dépendant des financements étatiques et limite le développement pérenne des disciplines sportives. Selon lui, tant que le pouvoir d’achat des ménages africains ne permettra pas une consommation de masse du sport, les subventions publiques continueront de jouer un rôle majeur. Cependant, il voit dans le sponsoring une alternative crédible, à condition de savoir capter et fidéliser les sponsors. Pour ce faire, il recommande une approche moderne du marketing sportif, une gouvernance rigoureuse, ainsi qu’une gestion transparente des finances.
Les pays comme l’Afrique du Sud et le Maroc sont cités par Mahama Coulibaly comme des exemples à suivre en matière de développement du sport. En Afrique du Sud, la structuration des compétitions, l’existence de propriétaires privés de clubs et la mise en place d’une politique de développement axée sur le sport en tant que produit touristique ont permis de bâtir un écosystème sportif attractif. Le Maroc, de son côté, affiche des stades pleins et une culture bien ancrée de consommation du sport. Au Nigeria, de grandes entreprises locales investissent massivement dans le sport, contribuant ainsi à la croissance de cette industrie.
En Côte d’Ivoire, l’essor du sport, en particulier du basketball, a été propulsé par l’élan de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), avec des partenariats solides entre les entreprises de télécommunications, les équipementiers sportifs et les fédérations. Mahama Coulibaly, qui a joué un rôle clé dans la structuration du basketball en Côte d’Ivoire, souligne l’importance de l’attractivité du produit sportif. Pour lui, un sport bien organisé, avec des athlètes mis en valeur et de bons résultats, est crucial pour attirer des sponsors et développer une visibilité internationale.
Pour attirer et retenir les sponsors, Coulibaly recommande plusieurs facteurs clés : un produit sportif de qualité, une gouvernance rigoureuse, une forte visibilité médiatique, et une capacité à offrir un spectacle attractif. Les entreprises veulent de la transparence et des résultats, et les fédérations doivent donc veiller à une gestion saine, à des comptes clairs et à une communication efficace avec les médias. Les médias traditionnels et numériques sont incontournables pour créer une exposition maximale du sport et de ses acteurs.
Le rôle de l’événementiel a également été mis en avant comme un levier stratégique pour développer l’attractivité du sport en Afrique. Mahama Coulibaly insiste sur l’importance d’élargir l’audience du sport, en visant un public plus large et diversifié, qui dépasse les frontières des seules disciplines concernées. Les fédérations doivent ainsi adopter une approche marketing moderne, visant à atteindre jusqu’à 70 % de personnes extérieures à leur discipline, car ce sont elles qui créent la valeur en consommant le sport, en achetant des billets et des produits dérivés.
Une autre recommandation clé de Mahama Coulibaly est la professionnalisation des fédérations et des clubs sportifs. Il déplore que, trop souvent, les décisions stratégiques soient prises par des passionnés, sans réelle expertise économique. Selon lui, il est essentiel de s’entourer de professionnels du secteur privé, de consultants et de cabinets spécialisés en management et marketing sportif pour attirer des investissements et aboutir à des résultats tangibles.
Le Salon du Sport Béninois a permis de mettre en lumière les défis et les opportunités du financement du sport en Afrique. Le sponsoring, bien compris comme un investissement stratégique, représente une voie prometteuse pour l’avenir du sport en Afrique. Pour réussir cette transition, les fédérations doivent se moderniser, se structurer et se professionnaliser, tout en misant sur une gouvernance transparente et une visibilité médiatique accrue. L’événement a également souligné l’importance de s’inspirer des modèles africains réussis, comme l’Afrique du Sud, le Maroc et la Côte d’Ivoire, pour construire un écosystème sportif durable et attractif pour les sponsors et les investisseurs.