Yves Sawadogo (agent de joueurs):  » Il faut favoriser l’épanouissement des talents »

Yves Sawadogo appartient à une nouvelle génération de consultants spécialisés dans le football touchant à tout l’écosystème. Ancien footballeur amateur en France, Yves Sawadogo vit depuis quelques années à Abidjan, la capitale économique ivoirienne sur les bords de la Lagune Ebrié. Depuis quelques années, il dirige sa propre structure Goal Média Event initiatrice de l’évènement annuel ‘’La Nuit du Football Africain’’.

Quel est votre parcours ? 

Avant d’être agent de joueur, j’ai moi-même jouer au football. Par cela, ça reste une continuité. Il y’a beaucoup à faire dans le football au niveau africain. J’essaie donc de contribuer du mieux que je peux à cette résilience.

Quel est, selon vous, l’impact du football sur la société ivoirienne, à la fois au niveau culturel et économique ?

Le football a un impact majeur sur la société ivoirienne, tant sur le plan culturel qu’économique. C’est bien plus qu’un simple sport ; c’est une véritable passion nationale qui unit les Ivoiriens de toutes les couches sociales et de toutes les régions. Sur le plan culturel, il renforce le sentiment d’appartenance à une même nation. Lors de grands événements, comme la CAN, toute la Côte d’Ivoire se rassemble, oubliant ses différences pour célébrer ensemble. Économiquement, le football crée des emplois, génère des revenus à travers les droits de télévision, les partenariats commerciaux, les sponsorings, et stimule l’industrie du tourisme, avec les matchs et événements internationaux qui attirent des spectateurs et des médias étrangers. Le chiffre officiel de 1.5 milliards de dollars qui a été annoncé comme investi dans l’organisation de notre CAN en témoigne quelque chose. Mais nous savons tous que ce sont tous les secteurs de l’économie ivoirienne qui ont été impactés, notamment les BTP et de la construction, les transports et la logistique, le secteur de l’événementiel et des services, les secteurs des télécommunications et j’en passe.

Comment décrivez-vous l’évolution du football en Côte d’Ivoire ces dernières années ?

Le football en Côte d’Ivoire a connu une belle évolution, avec une amélioration notable des infrastructures et un investissement accru dans les jeunes talents. L’arrivée de nouvelles technologies et de centres de formation modernes a permis de mieux préparer les futurs joueurs. De plus, le pays a maintenu une position forte sur le plan continental avec des performances remarquables dans des compétitions majeures. Le parcours historique lors de la CAN 2023 a marqué de façon indélébile les esprits et je pense que cet épisode restera pour longtemps une source d’inspiration pour les sélections à venir.  Cependant, il reste encore des efforts à faire pour que la Côte d’Ivoire devienne une véritable référence mondiale, non seulement à travers ses joueurs, mais aussi à travers une meilleure organisation structurelle du football local.

Quel rôle jouent les grandes compétitions internationales (comme la Coupe d’Afrique des Nations ou les qualifications à la Coupe du Monde) dans la popularité du football en Côte d’Ivoire ?

Les grandes compétitions internationales comme la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) et les qualifications pour la Coupe du Monde jouent un rôle crucial dans la popularité du football en Côte d’Ivoire. Ces événements sont une véritable fête nationale où tous les Ivoiriens, de l’intérieur du pays à la diaspora, se rassemblent pour soutenir les Éléphants. Dans les gradins et en dehors des stades, c’est l’effervescence totale. L’ambiance qui prévaut dans chaque coin de rue, dans chaque maquis ou même dans les domiciles, sans parler de l’atmosphère dans les gradins… ça stimule tout joueur de se savoir soutenu et les ivoiriens ont cet art de joindre la fibre patriotique à la passion du foot. L’impact est à chaque fois visible non seulement lors des victoires, comme en 1992, en 2015 ou en 2024 lors de notre triomphe à la CAN, mais aussi dans la manière dont ces compétitions stimulent l’engouement autour des jeunes talents et l’intérêt pour le football local.

Orange CI est un acteur majeur dans le soutien au football en Côte d’Ivoire justement. Selon vous, quel a été l’impact de leur soutien sur le développement du football en Côte d’Ivoire ?

Le Groupe Orange CI fait beaucoup pour le sport et en particulier pour le football dans le pays. Il a eu un impact très significatif sur le développement du football en Côte d’Ivoire, notamment par ses programmes de soutien aux jeunes talents et aux clubs locaux. En tant que partenaire majeur du football ivoirien depuis plusieurs années déjà, l’image de la marque a été pleinement associée aux grandes victoires de l’équipe nationale mais plus encore. Nous nous souvenons encore de leur légendaire campagne publicitaire ‘Supporter un jour, supporter toujours ». Ça en dit long sur leur présence. Ils ont permis à de nombreux joueurs et équipes d’avoir accès à des ressources essentielles, que ce soit en termes de financement, de visibilité ou d’infrastructure. Leur soutien aux compétitions et aux événements a également permis de donner au football ivoirien la reconnaissance qu’il mérite, à la fois au niveau national et international. Aujourd’hui, encore ils nous accompagnent sur « La nuit du football africain » qui est un évènement majeur de récompense et de valorisation des joueurs africains, mais également des hommes et des femmes engagées pour le développement de ce sport sur le territoire africain.

Alors justement quel rôle pensez-vous que les entreprises en Côte d’Ivoire peuvent jouer ?

Je pense que tout comme en Europe où je suis longtemps resté, les entreprises en Côte d’Ivoire, par les mécanismes de sponsoring et de subventions des clubs et centres de formation, mais aussi d’évènements sportifs, peuvent aussi jouer un rôle clé en créant des plateformes permettant aux jeunes de se faire repérer. Grâce à des partenariats avec des centres de formation et des académies, elles peuvent aider à mettre en place des programmes de scouting, de suivi et de formation pour les jeunes joueurs, leur offrant ainsi une passerelle vers le monde professionnel. Ces initiatives permettront de garantir que les talents émergents bénéficient de la meilleure préparation possible. De plus, le soutien aux infrastructures locales, comme la rénovation des terrains et la mise à disposition de moyens technologiques pour la formation, a permis d’améliorer considérablement le niveau du football local. Ces actions ont permis à de nombreux jeunes de rêver grand et de viser une carrière internationale, tout en restant ancrés dans leurs racines locales.

Comment percevez-vous la place des clubs ivoiriens sur la scène africaine et internationale ?

Les clubs ivoiriens ont une place importante sur la scène africaine, comme en témoignent les performances historiques de l’ASEC Mimosas ou du Stade d’Abidjan. L’ASEC, par exemple, a remporté plusieurs titres continentaux et continue de figurer parmi les clubs les plus respectés de la région. Sur la scène internationale, bien que nous manquions parfois de la même visibilité que les grands clubs européens, les clubs ivoiriens restent une force à ne pas sous-estimer. Il existe un potentiel énorme, mais il est crucial de renforcer l’organisation et la gestion des clubs pour rivaliser avec les meilleures équipes du continent et au-delà.

Des partenariats avec des clubs européens ou des initiatives comme celles d’Orange CI avec l’Academie MimosSifcom avec Jean Marc Guillou peuvent-elles aider à faire émerger de nouveaux talents à l’échelle mondiale ?

Oui bien sûr, je suis convaincu que des partenariats avec des clubs européens et des initiatives comme celles d’Orange CI sont essentielles pour faire émerger de nouveaux talents à l’échelle mondiale. Les partenariats avec des clubs européens permettent aux jeunes joueurs ivoiriens d’accéder à un niveau de compétition plus élevé, tout en bénéficiant d’une meilleure formation. Ces collaborations peuvent également ouvrir la voie à des bourses, des contrats et des opportunités professionnelles à l’international. Des joueurs comme Kolo Touré, Yayah Touré, Aruna Dindané, Kalou Bonaventure, Baky, Zokora… et autres sont issues de ce genre de partenariat.

Quels sont les défis majeurs du football ivoirien aujourd’hui ?

Le football ivoirien est confronté à plusieurs défis majeurs. En premier lieu, l’organisation des compétitions locales nécessite une profonde restructuration. Par ailleurs, malgré les progrès réalisés en matière d’infrastructures, il est urgent d’améliorer les équipements et de développer des centres de formation dans toutes les régions. Enfin, pour maintenir notre compétitivité sur la scène internationale, nous devons optimiser la gestion de nos talents et favoriser leur épanouissement local.

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