La scène s’est passée au stade Amadou Gon de Korhogo. Nous étions au lancement officiel de la Ligue 1 version 2025-2026. Et le président de la FIF a piqué une vive colère du fait de la mauvaise organisation de la cérémonie de lancement de la Ligue 1. Il s’en est donc pris vertement au président de la Ligue pro, Salif Bictogo. Et, qui plus est, devant la presse sportive. C’est qu’en lieu et place d’une cérémonie grandeur nature, festive, pompeuse, avec, bien entendu, toute la solennité qui sied à ce genre d’évènement, SB lui a plutôt servi un met indigeste. Fade. D’où donc la charge du grand Manitou contre son 5ème vice-pdt de la FIF. Ceci étant, cette scène, pour le moins cocasse, qui s’est déroulée, ce jour-là, dans la cité du « Poro », au-delà du fait que le pdt de la FIF ait fait preuve d’inélégance en critiquant son plus proche collaborateur sur la place publique, pose avec acuité le problème de l’autonomisation de la Ligue professionnelle de football. Et ce n’est pas la première fois que cette entité censée gérer le football professionnel dans notre pays est mise au banc des accusés. Il est, en effet, reproché à son pdt, SB, de ne pas prendre d’initiative pour rendre sa structure véritablement professionnelle. Ce que réfute le premier responsable de la LPF. Bien au contraire, SB dénonce plutôt un manque d’autonomie financière qui l’empêche la LPF de mener ses activités comme elle le voudrait. Etant donné que pour tout financement le président SD doit se tourner vers le Directeur exécutif, à défaut de sortir lui-même de cet argent de sa poche. Quitte à se faire rembourser plus tard. En clair, SB se dit noyauté, car sa structure ne jouissant d’une autonomie financière. A raison. Car, le système tel qu’il est pratiqué ne permet pas à la LPF d’être une vraie LPF au sens vrai du terme. Comme cela se passe ailleurs sur d’autres continents. Ou dans certains pays africains.
C’est justement pour corriger ce manque d’indépendance de la LPF que N°1 de la FIF s’était engagé à la rendre véritablement autonome. Et c’est écrit noir sur blanc dans son programme « Une Equipe pout rassembler et Développer. » Au demeurant, il est quand même rageant et révoltant de constater que cette soi-disant Ligue professionnelle n’est pas, ni évolué, ni bougé d’un iota depuis qu’elle a été portée fonts baptismaux en 1995, sous le mandat de Feu Dieng Ousseynou et dont le premier président fut Jacques Bernard Anouma. Pour dire quoi ? Que jusque-là, près d’une trentaine d’années après, cette LPF n’a jamais pu bénéficier d’une indépendance totale. Ni d’une autonomie assumée. Comme son ancêtre le « Comité d’organisation des compétitions », en acronyme, COC, cette LPF est toujours restée dans l’escarcelle de la FEDE. En fait, les textes actuels veulent que l’organe fédéral soit mamelle nourricière. Et que ce soit le président de la FIF qui nommât le président de la LPF (art. 51, al a). Or il aurait été intéressant qu’il soit élu. Plus loin, il est écrit que la LPF qui dépend entièrement de la FIF est financée par les subventions qui lui sont allouées par la faîtière (art. 90, al.). En clair, la LPF est sous la tutelle de la FIF. Et son autonomie ne peut que passer une réforme des Statuts afin d’extraire ou d’extirper ces deux articles qui les maintiennent prisonniers de la FIF. Autrement dit, cette Ligue pro est une coquille vide. Et ce, plus d’un demi-siècle après.
En tout cas, le temps est venu d’opérer des réformes pour l’autonomisation de cette LPF. Il faudra lui permettre de franchir un cap afin qu’elle ne soit plus totalement à la remorque de la faîtière. A ce niveau, pourquoi la FIF et la LPF ne serait pas liée par une convention comme cela s’est fait en France ? L’exemple français est en effet un modèle que le football ivoirien pourrait copier pour rendre sa Ligue pro véritablement professionnelle. Et, justement, voici ce que dit l’art. 2 de ladite convention en son al.1 : « La LFP bénéficie de l’autonomie administrative, financière et sportive en conformité avec les Statuts et Règlements de la FFF. Elle est administrée par un Conseil d’Administration élu par l’Assemblée Générale composée dans le respect des dispositions de l’article R. 132-3 du Code du sport. » Mais ce n’est tout. Puisque, la FFF a aussi concédé, dans cette même convention, la gestion et la commercialisation des droits d’exploitation des compétitions qu’elle organise. En outre, les deux entités se sont entendues pour se répartir les produits de la commercialisation des droits d’exploitation. En d’autres termes, la LFO a reçu carte blanche de sa faitière pour rechercher ses propres ressources. Et créer sa propre richesse. Bref ! Toujours est-il que fort d’un palmarès international riche en trophées continentaux dont 3 Can et 1 C1 et 2 C2, en plus de ses phases finales CM, le football ivoirien ne peut plus continuer à fonctionner comme à l’âge de la pierre taillée.
Il devra changer de paradigme. Et ne plus être réfractaire au changement. Et puis, que 3 ans après son élection, à quelques encablures également de la fin de son mandat, YID n’ait pas réussi à opérer des reformes dans ce sens est un aveu d’échec patent. Car, à l’heure du bilan, l’autonomisation de la LPF qu’il nous avait promis n’ont été que dans la bouche. Puisqu’on est resté au statuquo ante. Au fond, les promesses n’engageaient que ceux qui y croyaient, n’est-ce pas ? Et Chirac ou Machiavel, en tout cas, l’un des deux, avaient raison de le dire.
Kambniré Elie